Michel Bitbol
La physique et la primauté de l’action, Pages 277-291
Resumé: Une composante importante du programme physicaliste en philosophie de l’esprit consiste à rabattre, avec plus ou moins de subtilité, les normes sur le plan des faits, les actions sur le plan des événements, les intentions sur le plan des causes. Mais la mécanique quantique, théorie-cadre de la physique actuelle, est une discipline qui présuppose elle-même des catégories pratiques, normatives, intentionnelles, comme celles de mesure, d’observable, de clivage système-appareil, etc. Il s’agit là d’un aspect peu discuté du problème de circularité que soulèvent les tentatives de naturalisation (et plus particulièrement de physicalisation) de l’esprit. Dans l’approche de ce problème, je ne m’attarderai pas sur les résistibles tentatives que font de nombreux physiciens pour éliminer les éléments relevant de l’intérêt humain de leur discipline afin de faire régner un idéal de parfaite transparence dans l’accès à la nature. Je dresserai plutôt un parallèle entre les apories de la philosophie de l’esprit et celles de la physique quantique, afin de dégager leur signification commune : celle d’avoir mis au jour les limites (mobiles mais impossibles à ignorer) de l’œuvre d’objectivation.
Abstract:
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