Conceptions psychologiques et résultats pratiques

Madelrieux Stéphane
Langue de rédaction : Français
DOI: 10.3406/intel.2013.1061
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Il y a lieu de distinguer deux rapports chez William James entre sa psychologie et son pragmatisme. Le premier, déjà bien exploré, consiste à montrer que le pragmatisme comme méthode philosophique et comme théorie de la connaissance découle d’une théorie fonctionnaliste de l’esprit, qui fait de toutes les fonctions intellectuelles des instruments destinés à rendre l’action plus intelligente. Le second, rarement noté et que nous proposons d’analyser ici, revient à dégager une conception pragmatiste de la psychologie elle-même comme discipline scientifique. Ce projet se résume dans la formule de faire de la psychologie une « science pratique de l’esprit ». Nous montrons qu’il faut comprendre « pratique » en deux sens distincts mais articulés entre eux. D’une part, la psychologie doit devenir une pratique scientifique, fondée sur la recherche des lois causales, en s’émancipant de toute spéculation métaphysique (expérimentalisme). D’autre part, la constitution d’une telle science naturelle est la condition de son application pratique, notamment à l’éducation et à la médecine. Trois bénéfices peuvent être dégagés d’une telle reformulation des rapports entre psychologie et pragmatisme pour l’intelligence de la pensée de James. Elle permet de revaloriser toute une série de textes psychologiques généralement négligés car postérieurs aux Principles of Psychology (1890) mais antérieurs aux écrits sur le pragmatisme (1898). Elle autorise en outre le rapprochement entre deux pans de son œuvre psychologique, rarement rapprochés tant ils semblent hétérogènes, à savoir sa conception biologique de l’esprit et son engagement dans les « recherches psychiques ». Enfin elle permet de complexifier la généalogie de son pragmatisme, qu’on l’on rapporte souvent exclusivement à la défense de la foi religieuse (The Will to Believe, 1896), alors qu’on le voit émerger dans les mêmes années à l’intérieur même de la conception que James se fait de la psychologie comme science.



Pour citer cet article :

Madelrieux Stéphane (2013/2). Conceptions psychologiques et résultats pratiques. In Steiner Pierre (Eds), Pragmatisme(s) et sciences cognitives, Intellectica, 60, (pp.161-180), DOI: 10.3406/intel.2013.1061.